En 1996, le ministère de la Santé a confié au professeur Max Micoud, président de la section « prophylaxie des maladies transmissibles » du Conseil supérieur d’hygiène publique de France et au docteur Jean-Claude Labadie, membre du Comité technique national des infections nosocomiales et cofondateur de la Société française d’hygiène hospitalière, la charge de réaliser un guide national sur la désinfection des dispositifs médicaux. Nous étions toujours sous le coup du traumatisme de l’épisode de la Clinique du sport et de son épidémie à Mycobacterium xenopi et, force était de constater, qu’en France nous n’avions aucun guide officiel de référence sur ce sujet pourtant critique. Le ministère avait juste publié une première circulaire sur la désinfection des endoscopes s’appuyant sur les recommandations de 1994 de la Société française d’hygiène hospitalière.
L’aventure fut riche et intense, avec la première appropriation française de la classification du niveau de criticité des dispositifs médicaux et du niveau requis de désinfection en regard et la détermination de trois niveaux de désinfection avec des objectifs microbiologiques à atteindre. Un chapitre entier était consacré au risque viral avec une partie détaillée sur le sujet du papillomavirus, à l’initiative de notre collègue le docteur Agnès Lepoutre qui animait la cellule infection nosocomiale du ministère de la Santé à l’époque. Et à l’évidence, ce focus sur cette famille de virus oncogène était très précurseur. On rappelait alors, en termes de désinfection et de virus, la nécessité d’utiliser une solution alcaline de glutaraldéhyde à 2% pendant 20 minutes. La promotion des gaines de protection et de l’usage unique était faite et les fameuses recommandations pratiques de ce guide ont servi de base à développer en France dans le milieu du soin une culture de la gestion adaptée des dispositifs médicaux chez l’ensemble des professionnels de santé. Une vraie révolution !
Évidemment, le temps a passé et le monde a changé, la sécurité du personnel vis-à-vis du risque chimique a fait l’objet enfin, d’une meilleure prise en compte, les désinfectants ont évolué avec l’arrivée des produits oxydants avec leur efficacité remarquable sur les virus et bien entendu les enjeux climatiques nous ont rattrapés pour devenir désormais une priorité de pensée qui fera encore évoluer nos réglementations et nos approches dans le futur. Après plus de 20 ans de bons et loyaux service, et en l’absence de successeur à l’horizon, le Conseil scientifique de la SF2H sous la présidence du docteur Thierry Lavigne a décidé de se lancer dans l’actualisation du guide de 1998, un vrai défi comme il aime à en relever très régulièrement. Pour ce faire, deux pilotes ont été nommés à savoir Mme Pascale Chaize, vice-présidente de la SF2H et le docteur Arnaud Florentin, pilote de la commission désinfection de la SF2H. Même si je n’ai pas suivi de l’intérieur les débats, comme en 1998, j’ai pu constater que la réflexion a été longue et intense comme à l’époque et que la somme de travail fournie par l’ensemble des membres du groupe de travail n’a en rien été allégée avec, en plus, la rigueur scientifique et méthodologique que les années, et la SF2H, ont amené à cet exercice.
Dans une approche moderne de la gestion du risque infectieux, ce guide propose 10 recommandations socles toujours basées sur des grands principes de réflexion et d’approche du sujet. L’actualisation du cadre réglementaire et normatif, en particulier européen, qui a évidemment totalement changé avec les réglementations successives sur les biocides et les dispositifs médicaux, et l’évolution de l’approche normalisée de l’évaluation de l’efficacité des désinfectants, était une nécessité et c’est désormais chose faite. La désinfection des dispositifs médicaux est approchée avec une vision globale incluant l’architecture et l’ergonomie, et les techniques de traitements détaillées au sein de 11 fiches techniques très complètes.
Un immense merci à nos deux pilotes et à tous les experts qui ont contribué à la naissance de ce guide ainsi qu’à nos partenaires scientifiques institutionnels et en particulier la Société française des sciences de la stérilisation et la Société française en santé au travail.
Bonne lecture et découverte à chacun en espérant que cet opus version SF2H contribuera autant que son prédécesseur à porter les bonnes pratiques et à conforter la sécurité des patients partout où ils reçoivent des soins.
Bien cordialement